Si elles veulent remplacer à terme les options énergétiques actuelles (énergies fossiles ou nucléaire). les alternatives renouvelables doivent encore améliorer leur efficacité. Les solutions technologiques pour une économie plus durable proviendront peut-être de la nature elle-même. Empruntant la voie du biomimétisme (dont il a déjà été question à propos d’un robot-cafard), des chimistes de l’université de Pennsylvanie (États-Unis), en collaboration avec une équipe de l’université de la Ruhr à Bochum (Allemagne), ont mis au point à partir de biomolécules une cellule solaire convertissant l’énergie lumineuse, avec un procédé qui se révèle encore plus efficace que la photosynthèse. Explications.
Pour transformer le carbone issu du CO2 atmosphérique en carbone organique, brique élémentaire des sucres tels que le glucose, les cellule végétales puisent leur énergie grâce à un processus original : la photosynthèse. Dans une première phase, appelée phase lumineuse ou claire, l’énergie lumineuse portée par les photons est capturée afin d’assurer l’oxydation de l’eau en dioxygène, via un transfert d’électrons. Ces électrons fournissent à leur tour une énergie chimique suffisante pour entretenir le cycle de Calvin du carbone, et déboucher dans une seconde phase, dite sombre, sur la synthèse de glucides.
Des photons convertis en électrons
C’est sur la première phase de la photosynthèse qu’a travaillé l’équipe de chimistes. Ils se sont tout particulièrement à un photosystème noté PSI : c’est cet assemblage complexe d’une centaine de biomolécules qui permet aux chloroplastes de convertir l’énergie portée par un photon lumineux en énergie chimique, plus précisément en un électron. Celui-ci peut ensuite être utilisé par une molécule voisine au cours d’une réaction chimique : dans la cas présent, une enzyme hydrogénase catalyse la conversion des protons H+ et d’électrons en dihydrogène H2.
Dans la cellule, ces différentes molécules sont espacées : le transfert d’un électron produit par le PSI vers l’enzyme repose sur des phénomènes de diffusion non dirigés, et s’avère donc limité. Les chimistes ont voulu améliorer le rendement du système en accélérant le transfert d’électrons : ils ont synthétisé un composé plus condensé, liant le PSI à l’enzyme grâce à un “câble” moléculaire. Ce câble, qui ne mesure qu’une fraction de nanomètre (soit un milliardième de mètre), permet un transfert directe et donc rapide de l’électron produit par le PSI vers l’enzyme.
Là où un photosystème I appartenant à la cyanobactérie Synechococcus (une bactérie photosynthétique, comme les plantes) ne peut convertir chaque seconde que 47 photons en électrons, le composé obtenu présente un rendement deux fois plus important (105 conversions par seconde, mesuré à partir de la production de dihydrogène par l’enzyme). Le composé hybride, formé à partir de biomolécules et de fragments organiques synthétisés au laboratoire, permet donc de convertir plus efficacement l’énergie lumineuses des photons que le processus naturel de photosynthèse. Le flux d’électrons canalisé n’est rien d’autre qu’un courant électrique : il pourrait donc être utilisé dans une cellule photovoltaïque, ou pour alimenter comme c’est le cas ici des réactions chimiques afin de fournir des biocarburants, comme ici le dihydrogène.
Source : C. Lubner et al., Solar hydrogen-producing bionanodevice outperforms natural photosynthesis, PNAS, 12 décembre 2011.
Crédit photo : Oregon Department of Transportation (CC BY 2.0) ; Curtis Neveu (CC BY-SA 3.0).